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La leçon de vie d’une petite fille : donner du sens à un décès

23 mars 2022
Temps de lecture: 2 min

Joyce Verhaegen a mis au monde son deuxième enfant, Mercedes, en juin 2018. À la naissance se produit l’impensable : une erreur humaine lourde de conséquences pour Mercedes, qui décède à 6 jours de vie à peine. Un chagrin incommensurable. Pour Joyce et son mari, mais aussi pour leur aîné, Samuel, âgé de 2 ans et demi à l’époque.

Le récit de Joyce et Mercedes

« Après sa naissance, Mercedes a été immédiatement transférée au service de néonatologie. Elle y a reçu toutes sortes de soins. Mais après 6 jours, il ne nous restait plus aucun espoir de lui offrir une vie décente.

Ces 6 jours ont été incroyablement importants. Pour nous, en tant que famille. Pour moi, en tant que mère. Ils ont bouleversé ma vie et tout changé, pour toujours. Notre peine était immense ; nous ne nous attendions pas du tout au décès de notre fille. Ma grossesse s’est déroulée sans problème. Lorsque je suis arrivée à la maternité pour accoucher, je pensais pouvoir rentrer chez moi avec mon bébé deux jours plus tard. Au lieu de cela, je me retrouve au funérarium une semaine après sa naissance. C’était terrible.

Dans le même temps, pendant ces six jours, nous avons prié pour que tout se passe bien. Chaque minute. Chaque heure. Pour que nous puissions rentrer à la maison avec elle, de quelque manière que ce soit. Mais le sort en a décidé autrement. Mercedes est décédée dans mes bras à 6 jours de vie. Nous étions toujours à l’hôpital. Nous avons construit avec elle un lien unique durant cette semaine. Devoir la laisser partir nous a brisé le cœur.

Les moments les plus difficiles

Le chagrin lié à la mort de Mercedes était insupportable. Je suis vraiment tombée très bas. Mercedes s’en est allée en juin et il a fait très beau tout l’été. Mais je m’en moquais complètement. Les terrasses étaient bondées et je ne comprenais pas du tout. Voir les autres s’amuser chaque fois que je sortais de chez moi alors que mon enfant n’était plus de ce monde était bien trop douloureux. S’en sont suivies les “fêtes”. Le passage à la nouvelle année a été rude pour moi. Comment passer en 2019 alors que j’ai dû laisser ma fille derrière moi en 2018 ?

J’ai heureusement trouvé beaucoup de soutien auprès de Berrefonds, l’organisation qui aide les parents qui ont perdu un enfant, et auprès d’autres parents dans la même situation. J’étais incapable d’entrer en contact avec des personnes qui n’étaient pas en deuil, mais je n’avais aucune difficulté à aller vers d’autres parents qui avaient également perdu un enfant. Nous nous comprenions. La douleur nous rapprochait.

Chercher de l’aide

Les contacts avec des personnes dans la même situation sont très précieux, car nous comprenons nos émotions mutuelles, mais il faut veiller à ce que les histoires des autres parents ne deviennent pas trop lourdes à porter.

Exprimez votre tristesse et donnez-vous du temps. Beaucoup de temps, parfois. Ne faites rien qui aille à l’encontre de vos sentiments, quoi qu’en pense votre entourage.

Et faites comprendre à vos proches ce dont vous avez besoin. Ils ne savent pas comment vous vivez le deuil. Ils veulent aider, mais se sentent souvent impuissants. Communiquez-leur vos besoins quand vous en trouverez la force. Par exemple : “je n’ai pas envie de parler maintenant, mais je ne refuserais pas un bon repas”. Ou encore : “j’apprécierais aller me promener, mais pas trop longtemps. Pourrais-tu me ramener quand je te ferai comprendre que c’en est assez ?”

La tristesse d’un grand frère

Je voulais arrêter de vivre. C’est mon fils Samuel qui m’a fait me lever et m’habiller chaque matin. Mais combiner ce deuil profond à la jeune parentalité fut un réel défi. Je vivais pour lui, mais j’avais tant de peine que j’avais beaucoup de mal à exercer correctement mon rôle de mère.

Les deux premières années ont été un véritable enfer pour moi. Mais les choses changent petit à petit. La douleur s’atténue et fait aujourd’hui partie intégrante de moi. Elle devient plus étroitement liée à ma personnalité, à qui je suis, à nous en tant que famille. Elle ne disparaît jamais. Mercedes est ici plus que jamais. Elle est à sa place. Parmi nous tous. Même avec Elektra, ma fille venue au monde après. Nous avons une photo de Mercedes sur l’armoire. Elektra n’a pas encore 2 ans, mais elle montre cette photo en disant “Merch, Merch, sœur”. Elle a parfaitement sa place ici.

En quête de sens

Lorsque Samuel est entré à l’école en septembre 2018, j’ai remarqué qu’on laissait peu de place à son chagrin. C’est pourquoi j’ai fondé l’ASBL Levensles van Mercedes. Nous nous sommes rendus avec un groupe de bénévoles dans plusieurs écoles afin de donner des conseils aux enseignants et aux élèves sur le deuil et la perte. L’idée étant toujours de briser le tabou autour du deuil. C’était pour moi le meilleur moyen de panser ma blessure, une manière de donner un sens positif à la perte de Mercedes.

Aujourd’hui, l’ASBL évolue. Nous constatons que tous les changements sociétaux renforcent le besoin de connexion plus que jamais. Nous avons beaucoup perdu ces derniers temps. Certains ont perdu des proches, mais nous avons également tous laissé derrière nous une part de sécurité, d’amitié et de santé (mentale). D’où notre volonté d’élargir notre mission et de travailler également sur la perte en vie. Nous voulons trouver un moyen de rester connectés, en tant qu’individus, malgré toutes nos différences. »

Chaque processus de deuil est unique. Consultez nos conseils visant à vous aider à faire votre deuil à votre manière.

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