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Le décès d’un enfant

Temps de lecture: 9 min
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Quoi de plus douloureux dans la vie d’un parent que la perte d’un enfant ? Vos rêves et votre vision de l’avenir cèdent le pas à des sentiments accablants tels que la tristesse, la culpabilité, la colère et l’angoisse. L’amour qui perdure est souvent la seule lueur d’espoir.

Douleur

La perte d’un enfant ne s’inscrit pas dans le « cours normal » de la vie. Elle vous touche au plus profond de vous-même et le deuil qui s’ensuit est extrêmement éprouvant. Le chagrin se manifeste dans vos émotions, votre comportement, vos pensées et votre corps.

Un chagrin qu’An Hooghe décrit avec précision dans son livre « Anders Nabij » : «Le sentiment violent, qu’on ressent jusque dans la moindre cellule du corps, est parfois insupportable. On ne sait pas comment échapper à la douleur, on a le cœur en miettes, le corps en ébullition, le système nerveux surstimulé… On a des trous de mémoire, on a du mal à dormir, on ne parvient plus à se réchauffer les pieds et les mains ni à se reposer… On a envie de s’endormir et de ne plus jamais se réveiller, ou de ne se réveiller que quand ce terrible cauchemar sera terminé, quand la douleur sera un peu plus supportable. On a envie de dormir, d’hiberner, parce que c’est trop dur. »

En plus d’un immense chagrin, vous êtes souvent envahi de sentiments de culpabilité, d’angoisse et de colère.

Culpabilité

Un parent se sent responsable de son enfant ; d’où le sentiment de culpabilité qui l’assaille quand il le perd.

Dans « Casper, een rouwboek », Uus Knops parle de son frère décédé : « … nous nous sommes aussi sentis coupables, surtout mes parents. Si seulement nous n’avions pas laissé les garçons partir si loin ! Si seulement nous les avions davantage mis en garde ! Si seulement nous avions… Ces sentiments de culpabilité sont normaux et traduisent une volonté désespérée de savoir si nous aurions pu faire quelque chose pour éviter le pire. Nous avons vécu le fait de pouvoir poser ces questions à voix haute et de pouvoir en parler comme une reconnaissance de notre chagrin. Bien qu’il parte d’une bonne intention, le fait de minimiser notre culpabilité pour nous apaiser ne nous apportait pas cette reconnaissance. Et pourtant, ces questions ne nous semblaient pas légitimes quand elles émanaient de quelqu’un d’autre. Elles sonnaient comme un jugement, un blâme. »

Il y a pourtant une grande différence entre être coupable et se sentir coupable.

Quand on culpabilise, c’est notre esprit qui réagit pour tenter de contrôler une situation dans laquelle nous sommes totalement impuissants. Quand on est parent, la culpabilité nous donne l’impression qu’on aurait pu faire quelque chose pour éviter le pire, alors qu’en réalité, ce n’est pas le cas.  

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Angoisse

Le décès d’un enfant est contre nature. Le choc est tel qu’il provoque un sentiment d’insécurité et d’anxiété, qui s’exprime souvent à l’égard des enfants qui restent. Les parents craignent de perdre un autre enfant ou que la grossesse suivante se passe mal. La perte peut donc peser dans la décision d’avoir un autre enfant.

Beate Matznetter, psychologue, conseillère en matière de deuil et experte du vécu : « Ce qui me vient à l’esprit en premier lieu quand je pense aux séquelles permanentes, c’est la peur constante d’une nouvelle perte. Je n’ai pas envie d’être une mère poule et une épouse trop anxieuse. Mais cette angoisse ne me quitte pas et je dois constamment me faire violence pour la contrôler. Nous sommes forcément des parents plus inquiets que les autres à certains moments et nos enfants en pâtissent très probablement. »

Ann, la sœur aînée de Marlies, décédée à 2 jours : « Après le décès, maman a commencé à se montrer très anxieuse vis-à-vis de l’enfant qui lui restait et vis-à-vis de son mari. Jusqu’à la fin de sa vie, elle ferait tout pour qu’il ne leur arrive rien. Mais plus les années passaient, plus la situation devenait incontrôlable. L’inquiétude a viré à l’excès. Maman m’a mise sous cloche. Et la cloche était toujours là. Elle était même de plus en plus étroite, surtout après le décès de papa. »  

Colère

Pourquoi devons-nous subir cette épreuve ? Aurait-on pu l’empêcher ? La frustration alterne avec le désespoir et la colère. Cette dernière peut prendre le dessus, surtout si le décès est dû à des facteurs externes (accident, erreur médicale…).

Beate Matznetter : "Cette colère, mêlée d’impuissance, envers les autres, qui auraient pu faire quelque chose, nous aide parfois quelque temps, voire longtemps, à faire face à ce sentiment d’avoir été incapables de protéger notre enfant. La colère dirigée vers le coupable, et ensuite peut-être vers nous-mêmes, peut commencer à dominer notre vie."

Elle est compréhensible et tout à fait normale. Mais si cette colère extrême perdure, demandez l’aide d’un professionnel.

« Aucun enfant n’est plus présent que celui dont on pleure l’absence. Vous n’êtes plus jamais seul. Où que vous alliez, elle vous accompagne d’une manière ou d’une autre. »

Elsbeth Kuysters dans « Moederhart vol rouw en liefde »

Impact de la perte sur le reste de la famille

Les membres de la famille d’un enfant décédé ont tendance à se montrer surprotecteurs les uns vis-à-vis des autres, tant les parents que les autres enfants.

Un parent ne veut bien souvent pas que son chagrin pèse sur les autres enfants. Il est pourtant essentiel de pouvoir l’exprimer, afin que les enfants sachent qu’il n’y a pas de mal à partager ses sentiments.

Les frères et sœurs de l’enfant décédé essaient aussi souvent d’épargner leurs parents. Lorsque ces derniers ne peuvent pas apporter un soutien adéquat parce qu’ils sont submergés par le chagrin, il arrive que les enfants assument des rôles qui ne conviennent pas à des enfants de leur âge.

Beate Matznetter : « Jan et moi pensons que la vie aurait été beaucoup plus simple pour notre autre fils si son frère jumeau n’était pas décédé. Nous l’avons trop protégé, trop contrôlé, trop aidé. Les autres membres de la famille souffrent aussi quand toute l’attention se porte sur un enfant, considéré comme celui qui a perdu le plus. Ils ont l’impression (à juste titre) d’être livrés à eux-mêmes. Ou ils ont simplement envie de parler d’autre chose. J’ai aussi eu et j’ai toujours tendance à surprotéger mon mari, à vouloir l’aider, à lui accorder plus d’attention. Je voulais et je veux qu’il mène une vie saine et qu’il ne prenne pas trop de risques. Il y voit évidemment une forme de contrôle. Et il déteste ça. Qui ne détesterait pas ? C’est le combat quotidien de bien d’autres hommes et femmes dans leur relation de couple, mais je suis certaine que c’est encore plus le cas chez nous depuis la mort de Jorin. »

La perte d’un enfant adulte

Si votre enfant vivait encore chez vous, vous êtes confronté au manque en permanence. Mais la perte n’en est pas moins douloureuse si votre enfant avait déjà quitté le nid. Vous aviez probablement bâti une relation d’amitié étroite avec votre enfant adulte : vous perdez donc un enfant, mais aussi votre meilleur ami.

Et si votre enfant adulte était marié ou avait fondé une famille, l’attention se porte généralement sur la peine de cette famille plutôt que sur celle des parents. Gardez à l’esprit qu’on attendra peut-être de vous que vous apportiez soutien et réconfort au conjoint et aux enfants. Il se peut aussi que des tensions apparaissent ou que les tensions qui existent avec la belle-famille s’aggravent après le décès, ce qui peut avoir un impact sur votre relation avec vos petits-enfants.

Lueurs d’espoir

La perte d’un enfant vous transforme fondamentalement et ne vous quitte jamais totalement. Mais même après cette épreuve douloureuse, on voit des parents qui, au bout de quelque temps, prennent leur deuil à bras le corps et cherchent des moyens d’alléger un peu leur peine. Ann Costermans, conseillère en matière de deuil et de perte : « Certains parents fondent des ASBL, écrivent des livres, organisent des journées d’information sur le deuil et la perte ou s’engagent comme bénévoles au sein d’associations de soutien. Ils font aussi des choix très réfléchis, tant au niveau des activités que des contacts sociaux. Ils disent “non” à ce qui leur prend de l’énergie et “oui” à ce qui leur en procure. Ils ont un point commun : leur amour immense et le lien durable qui les unit à leur enfant décédé. Ce lien et cet amour ne disparaîtront jamais. Parce que si la vie a une fin, l’amour, lui, est infini. »

Témoignage de Julie De Keersmaecker après la perte de sa fille Marie de 3 ans :

« Je me suis recentrée sur moi et sur ce qui m’était cher. Il fallait que j’ose montrer ma “puissante vulnérabilité”. Pour finir par me redécouvrir (le chagrin vous ramène à ce que vous êtes au plus profond de vous-même), me trouver des talents cachés et nouer des amitiés sincères. La tristesse profonde a finalement laissé place à un amour infini. Le chagrin vous ramène à l’essentiel. »

Où trouver un appui et que faire pour obtenir le soutien et la reconnaissance que vous attendez ?

Le deuil et la perte d’un enfant sont très éprouvants. Le travail de deuil requiert, en effet, une débauche d’énergie. En parler peut aider. Allez chercher du réconfort dans des groupes de soutien, parlez à vos amis et à votre famille ou demandez l’aide d’un professionnel dans ce processus de deuil.

 

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